Le sommeil a été interrompu en cette nuit où défilaient, à la manière d’un film, des scènes projetées dans une salle obscure et désertée pour un arrêt sur image. Arrêt sur sa vie.
Image arrêtée de celle qui l’a retenue dans son départ pourtant programmé et qui s’éloigne malgré elle en solitaire pour quelques mots maladroits.
Combien de barreaux, pourtant a-t-elle ajouté à cette échelle posée sur cet arbre dressé sur son chemin, un soir d’avril ? Combien d’espoirs énoncés et entendus ? Combien d’arbres intacts en attente ?
Arbres, qui depuis, par morceaux se sont calcinés, dans quelques cheminées de hasard dans d’autres décors, autres destinées, plaintes qui résonnent en écho pour des réveils spontanés perturbant un peu plus son sommeil dans cette obscurité étrangère.
Départ tôt le matin, aucun pas ne foulant le bitume, aucun regard croisé, seule une musique familière intimement écoutée accompagne sa marche matinale qui la mène dans un lieu aux odeurs de café où ses mots glissent dans une écriture automatique sur une feuille quadrillée.
Elle l’a laissée dans son sommeil artificiel sans faire de bruit sans signaler un départ provisoire.
Elle a été troublée cette nuit par son évocation, au travers de ses mots, cris spontanés ,à un autre départ pour un voyage improvisé qui pouvait mettre fin à des douleurs tel un accident de parcours sur des chemins trop sinueux où il est plus aisé de trébucher.
Elle s’est faite alors architecte d’un instant à construire de ses jeux de mots, humour dérisoire un abri apaisant et dans d’ultimes gestes malhabiles lui a conté ses espoirs de contrées lumineuses.
Chasser l’image de cet arbre tronçonné par une ladysection et se consumant dans des cheminées imaginaires. Chasser les allers et venues d’automates qui viennent la troubler dans des rappels à d’autres décors, couloirs parcourus par des fugitifs , compagnons de naufrage d’autrefois privés de regard, orbites vidées par des chefs autoritaires sans scrupule.
Nuit à se battre contre des moulins à vent, tel Don Quichotte épuisé par une fougue virtuelle dans des paysages d’apparence hostile.
Supprimer toutes traces, restes de combat, vestiges de toutes les guerres sans ennemi et rêver encore.
Rêver à d’autres paysages esquissés par quelques artistes talentueux.. Rêver à d’autres airs fredonnés dans des vertiges aériens.
Elle s’est isolée, murée à se construire une forteresse protectrice contre vents et marées, contre un temps qui s’écoule dans un sablier au rythme indécent.