Machinalement mes doigts pianotent.
L’oubli s’installe pour l’instant dépassé et le geste mécanique conduit à l’écriture du temps intérieur.
Le visage brûlant et la main fiévreuse contiennent la tempête, la caresse retenue.
Les mots au bord des lèvres, au bout des doigts, s’épaississent, se bousculent, se réunissent en un cri puissant :
Je t’aime
Je revois alors ton visage, tes yeux qui se glacent, ta voix qui devient différente et qui me glace.
Alors je vis ma propre destruction
Viva la muerte
Tu es ma mort, ou bien son ombre et je t’aime à mourir.
Je vais disparaître dans cette folie, je vais m’y glisser sans confort et sans espoir pour mieux en finir.
Je vois trouble derrière ce rideau de larmes dérisoires.
Voile d’un regard qui se perd toujours.
Rideau d’un théâtre tragique en représentation toujours, face à un public insensible, je joue à me détruire pour renforcer cet amour qui à force de ne pas naître tout à fait, oscille sans cesse entre la vie et la mort.
Nous ne sommes pas sur la même scène, mais tu n’es pas n’importe qui et ton rôle est nécessaire au mien, sans ta réplique, je n’existe plus, je reste seule devant la machinerie infernale de décors carton-pâte.
Sur ta scène, il y a ton monde installé.
Tu veux y régner sereine et tu me repousses, tache de sang, de ton univers.